Margaret Atwood répond à l’interdiction de La Servante écarlate dans les écoles de l’Alberta

Publié par Francois Nedje Jacques | septembre 6, 2025

Margaret Atwood
Francois Nedje Jacques

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le septembre 6, 2025

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La célèbre écrivaine canadienne Margaret Atwood a pris la plume pour réagir à la  décision d’interdire certains livres dans les bibliothèques scolaires de l’Alberta, dont son roman emblématique La Servante écarlate.

Face aux demandes répétées de réactions médiatiques, selon l’auteure sur X,  Atwood a choisi la voie de la satire. Dans un texte publié sur sa plateforme Substack, elle a partagé une courte nouvelle volontairement caricaturale, qu’elle qualifie de « parfaitement adaptée à des élèves de dix-sept ans dans les écoles de l’Alberta. Contrairement, nous dit-on, à La Servante écarlate. »

Avec un humour mordant, Atwood y met en scène John et Mary, deux enfants modèles qui grandissent sans jamais connaître de réalités humaines, ni besoins naturels, ni sexualité, ni mort. Devenus adultes, ils se marient, élèvent cinq enfants « parfaits » et mènent une vie irréprochable, dénuée de contradictions ou de failles. Le récit tourne en dérision une vision aseptisée et infantilisante du monde, reflet implicite des politiques de censure scolaire.

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L’autrice en profite aussi pour dénoncer l’hypocrisie de certains discours moraux : ses personnages, bien qu’issus d’un cadre chrétien, ignorent les enseignements de compassion du Christ et s’en remettent à un capitalisme sans scrupule, inspiré par Ayn Rand. La nouvelle se conclut de manière absurde, puisque John et Mary « ne moururent jamais », la mort étant jugée trop inconvenante pour être représentée.

En parallèle, Atwood a rappelé qu’elle avait abordé cette interdiction lors de son discours prononcé au Congrès du PEN International à Cracovie, insistant sur les dangers de la censure et la nécessité de protéger la liberté d’expression.

collage, CP: Margaret Atwood-page Facebook de l’auteur et couverture de La Servante e.

À propos de Margaret Atwood

Née en 1939 à Ottawa, Margaret Atwood est l’une des autrices canadiennes les plus lues et reconnues à travers le monde. Poète, romancière et essayiste, elle est l’auteure de nombreux ouvrages marquants, dont La Servante écarlate (1985), adapté en série télévisée à succès, et Les Testaments (2019), lauréat du Booker Prize. Ses œuvres, traduites dans plus de quarante langues, explorent des thèmes liés au pouvoir, à la condition féminine, aux libertés civiles et à l’avenir de nos sociétés.

La nouvelle

Voici un petit morceau écrit par moi, parfaitement adapté à des élèves de dix-sept ans dans les écoles de l’Alberta .  Contrairement, nous dit-on, à La Servante Ecarlate. (Désolé les enfants, mais votre ministre de l’Éducation pense que vous êtes des bébés attardés.)

John et Mary étaient deux enfants exemplaires. Jamais ils ne se curèrent le nez, jamais ils n’eurent de besoins naturels ni de boutons disgracieux. En grandissant, ils se marièrent l’un à l’autre et eurent cinq enfants parfaits, sans jamais avoir eu de relations sexuelles. Bien qu’ils se réclamassent du christianisme, ils n’accordaient aucune importance aux paroles de Jésus sur les pauvres, le Bon Samaritain ou encore le pardon des ennemis. À la place, ils pratiquaient un capitalisme avide et égoïste, car ils vénéraient Ayn Rand. (Même s’ils feignaient d’ignorer la scène de La Source vive où le “viol consenti” est présenté comme une possibilité  qui voudrait s’y attarder, après tout ? Et puis, cela aurait impliqué du sexe et serait, de fait, pornographique. Ce qui, d’une certaine manière, n’est pas faux.)
Ah, et ils ne moururent jamais  parce que qui voudrait s’attarder sur la mort, les cadavres et tout ce qui va avec, beurk ? Ainsi vécurent-ils heureux pour l’éternité.

Fin

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